Prochaine coache de Lucas Pouille, Amélie Mauresmo fait bouger les lignes
- Publié le 14-12-2018 à 07h06
- Mis à jour le 14-12-2018 à 08h26
Après avoir coaché Murray, la Française conduira le destin de Lucas Pouille. Amélie Mauresmo, 39 ans, persiste et signe ! Après avoir coaché Andy Murray, la voilà qui prend sous son aile Lucas Pouille. L’ancienne championne française ne voit pas pourquoi une femme ne pourrait pas entraîner un homme. C’est pourtant loin d’être courant, en tennis comme dans la plupart des autres sports professionnels.
La démarche relève même souvent du véritable défi. Lorsque la Fédération espagnole avait intronisé l’ancienne joueuse Gala Leon Garcia à la tête de l’équipe de Coupe Davis, elle avait hérité d’une tornade de critiques. Même Toni Nadal, le coach de Rafa, avait sorti l’artillerie lourde pour contester cette décision.
"Je ne suis évidemment pas contre l’idée qu’une femme coache un joueur. Mais la Coupe Davis, c’est très particulier. Il faut une alchimie dans l’équipe. Tout se passe beaucoup dans le vestiaire avec des hommes en petite tenue. Je ne suis pas sûr que Gala Leon soit la bonne personne…"
Lorsque Andy Murray fit appel en 2014 à Amélie Mauresmo, la presse anglaise sortit les mêmes arguments.
"Il y a assez d’endroits sur les tournois, comme le salon des joueurs, pour se parler avant un match", avait répliqué le champion écossais, balayant d’un coup les fantasmes des tabloïds.
Ceux-ci avaient alors imaginé qu’au travers de Mauresmo, Andy cherchait une sorte de deuxième maman ! Le Daily Express avait même tenté une analyse morphopsychologique des deux femmes pour voir si Amélie ressemblait à Judy !
En vérité, le couple Mauresmo - Murray, rebaptisé Murraysmo, avait fait couler beaucoup d’encre, un peu comme s’il s’agissait d’un big-bang sur la planète tennis. Mais le champion britannique a toujours pleinement assumé son choix. À l’époque, alors qu’il sortait d’une belle collaboration avec Ivan Lendl, il avait expliqué sa démarche.
" Je me suis dit qu’avec une femme, je pourrais encore passer de nouveaux caps. Je connaissais Henin, Clijsters et Mauresmo. J’ai parlé de ces joueuses à Darren Cahill (NdlR : un des coachs les plus respectés du circuit) qui m’a dit qu’Amélie pourrait parfaitement convenir…"
L’association dura deux ans avec, à la clé, sept titres (dont deux sur terre battue, une surface où il n’avait jamais gagné) et deux finales de Grand Chelem. " Elle m’a beaucoup apporté par son calme et sa connaissance du jeu. Elle m’a permis de passer des paliers", avait-il confié.
Mauresmo était aussi ressortie ravie de cette expérience. Comme lorsqu’elle avait révélé son homosexualité en 1999, la Française sait qu’elle a clairement fait bouger les lignes dans l’univers parfois un tantinet macho du tennis. Et elle ne s’arrête d’ailleurs pas en si bon chemin. Pressentie dans le rôle de capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis, elle a finalement opté pour entraîner Lucas Pouille.
"Exceptionnel dans ce milieu macho"
Dominique Monami salue le retour de Mauresmo sur le circuit masculin, et la met en garde…
"C’est formidable pour la condition de la femme en général dans le milieu du sport de haut niveau."
Au moment d’évoquer la nouvelle coach de Lucas Pouille, Dominique Monami ne lésinait pas sur les superlatifs. "C’est exceptionnel. Dans le tennis masculin, les femmes ne sont pas souvent prises au sérieux car, comme c’est le cas dans beaucoup de sports de haut niveau, c’est un milieu de machos."
Si la Verviétoise observe néanmoins une tendance "qui s’améliore", elle souligne qu’il est très complexe pour une femme d’être acceptée et soutenue dans le sport masculin. "On pardonnera beaucoup plus facilement à un homme. À l’époque où elle coachait Murray, Mauresmo avait été critiquée quand les résultats de son poulain étaient moins bons. Bref, elle devra, encore une fois, prouver sa valeur trois fois plus qu’un homme…"
évincée dans des conditions lugubres du capitanat de la Fed Cup il y a quelques mois, Dominique Monami ne semble toujours pas avoir digéré ce licenciement et confesse qu’elle préfèrerait se retrouver à la tête de l’équipe de… Coupe Davis plutôt qu’en Fed Cup.
"Les hommes sont plus directs, plus francs, ce qui permet d’être plus constructif. Il y a moins de coups dans le dos."
Mais lorsqu’on se met à rêver de pareille entreprise que le duo Mauresmo-Pouille en Belgique, la réponse fuse. "Voir David Goffin s’associer à Justine Henin ou Kim Clijsters, cela ne devrait pas être surprenant, mais il y a des barrières qui empêchent cela."
Un problème de mentalité qui risque de se perpétuer, regrette l’ex-top 10. "Ce qui semble être un frein devrait être vu comme une force. Il suffit de voir la cérémonie du Ballon d’or pour voir le peu de crédibilité dont jouissent les femmes. Amélie est quelqu’un de bien et je lui souhaite de réussir dans ce milieu hostile. C’est par ce type d’initiative qu’on bougera les lignes."